Désalcoolisation
« L'originalité de notre process tient à sa capacité à agir pendant la phase de fermentation alcoolique »

Tandis que le réchauffement climatique favorise la production de raisins plus mûrs et donc de vins naturellement à plus haut degré d’alcool, davantage de consommateurs aspirent à des vins moins alcoolisés. Pour répondre à cette double contrainte, le département Recherche et Développement de PELLENC a mis au point une nouvelle technologie de désalcoolisation, en partenariat avec l'Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement (INRAE) et l'Institut Français du Fin (IFV). Cette technologie, dont le brevet a été déposé en 2023, permet de diminuer significativement le degré d’alcool des vins tout en préservant leurs qualités aromatiques.
Rencontre avec Anne-Claire Bonneau, Œnologue au Département R&D et Applications Œnologiques chez PELLENC.

 

Quelles sont aujourd’hui les principales technologies de désalcoolisation ?

Pour diminuer le taux d’alcool des vins, il est possible de réduire la concentration en sucre des moûts par ultrafiltration puis nanofiltration en amont de la fermentation alcoolique. Problème, dans ce cas, on constate une perte de volume de 7 à 10 % par degré. Il y a la Spinning Cone Column, une technologie d’évaporation sous vide qui permet de retenir les arômes et l'alcool par la suite. 

Mais l’installation est très encombrante et nécessite un investissement très important, de l’ordre d’un million d'euros au minimum. Enfin, l'osmose inverse permet de diminuer efficacement de quelques degrés le taux d’alcool des vins. En revanche, cette technique nécessite une forte consommation d’eau et on obtient en résidu, de l’alcool à 10 % vol. qui n’est pas valorisable.

En quoi la technologie PELLENC est-elle différente ?

L'originalité de notre process tient à sa capacité à agir pendant la phase de fermentation alcoolique. Nous récupérons une fraction du moût dans la cuve principale que nous passons ensuite dans un module spécifique pour le désalcooliser. Pendant ce temps, le reste du vin continue sa fermentation. Une fois le moût désalcoolisé, nous le réintégrons dans la cuve principale afin de terminer la fermentation. Finalement, nous obtenons des vins entre 9 et 12 % vol. aux qualités aromatiques très intéressantes. Autre avantage, notre process permet de récupérer le produit de la désalcoolisation, de l'alcool à 45-47 % vol. qui peut être parfaitement valorisé pour faire des alcools de bouche. Il y a donc également un vrai intérêt économique à investir dans notre procédé SMART WINELYSE.

Est-ce que l’objectif à terme est de produire des vins sans alcool ?

Absolument pas. Notre technologie n’a pas vocation à faire du vin totalement désalcoolisé. Elle vise à baisser de quelques degrés le taux d’alcool final des vins qui sont considérés comme trop alcoolisés aujourd'hui. Et aussi de produire des vins aux arômes très intéressants. C’est notamment le cas des vins de la moitié Sud de la France ou encore de la Vallée-du-Rhône. 

En 2023, sur certaines parcelles de Châteauneuf-du-Pape, nous avons ramassé les raisins à 16 % vol. en potentiel d'alcool. L’utilisation de notre technologie a permis de réduire le degré d’alcool à 12 ou 13 % vol. C’est très significatif et surtout, nous arrivons à être vraiment proches en termes aromatiques d'un vin qui n'aurait pas subi ce procédé là.

Peut-on envisager d’autres solutions pour baisser le taux d’alcool des vins ?

Certains viticulteurs récoltent le raisin plus tôt dans la saison. Mais cela a un impact sur les qualités organoleptiques des vins avec notamment des arômes végétaux plus prononcés. Or aujourd'hui, la majorité des consommateurs veulent des vins fruités, moins taniques et avec des notes végétales plutôt discrètes. C’est un peu la recherche du mouton à 5 pattes !

Est-ce que ces vins en partie désalcoolisés ont une appellation spécifique ?

Au-delà de 8,5 % vol. d’alcool, on reste sur la dénomination vin. Un vin est dit « partiellement désalcoolisé » entre 0,5 et 8,5 % vol. En dessous de 0,5 % vol. d’alcool, c’est ce qu’on appelle un « vin totalement désalcoolisé » ou « no alcool ». Nous, notre objectif n’est pas de faire du zéro alcool mais bien de diminuer le taux d’alcool tout en conservant

les qualités aromatiques des vins. Aujourd’hui, il faut faire une demande de dérogation pour réaliser des vins partiellement désalcoolisés en IGP et en AOP. Mais face aux nouvelles attentes des consommateurs et à la démocratisation des vins désalcoolisés et no-low alcool, les instances viticoles bougent.

Est-il plus difficile de désalcooliser certains vins ?

Les vins rouges sont toujours plus délicats à travailler. L'alcool est un support de structure et participe à l’harmonie du vin. C’est pourquoi le résultat n’est pas toujours satisfaisant pour les vins rouges partiellement désalcoolisés et a fortiori les vins rouges sans alcool. Avec notre procédé en fermentation alcoolique, en revanche, nous arrivons très bien à préserver les couleurs et les arômes des vins et à obtenir un très bon équilibre organoleptique.

A qui s’adresse votre innovation ?


Notre machine, Smart WineLyse s’adresse en priorité aux caves de grande taille mais aussi aux Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole (CUMA). Tout l’équipement nécessaire pour réaliser notre process s’installe sur une remorque. Il peut donc également intéresser des prestataires vinicoles qui vont pouvoir venir dans les caves de leurs clients et proposer la désalcoolisation en cours de fermentation alcoolique PELLENC.